Merci à Livraddict et aux éditions JBZ & Cie de m’avoir permis de découvrir Halte à Yalta.
Mettons que c’était pour toutes ces raisons que je l’avais laissé me suivre. Mettons que j’avais trouvé le frère cadet qui me manquait. Mettons que j’avais trouvé l’enfant que je n’avais pas vu – voulu voir ? – naître. Je crois que je comprenais petit à petit pourquoi, d’une banale rencontre faite dans un train, était née une histoire – je ne dis pas une amitié ; entre le Tatar et moi, il s’agissait à la fois de bien plus et de bien moins que cela – une histoire, oui, qui devait durer dix jours à ne pas se lâcher d’une semelle.
Mon avis :
Il faut être attentif pour ne pas se perdre au détour de ce récit en esquisses. Portraits et paysages sont agrémentés de zones d’ombres où la confusion est maîtresse, ainsi n’y a-t-il pas de différence entre les ifs et les cyprès, ainsi, le narrateur, un psy boiteux, devient-il baron, ainsi peut-on être Tatar simplement parce que l’on a le nez aquilin.
Dans Halte à Yalta, un psy à la dérive prend le train au hasard, pour se perdre ou se retrouver, pour mettre derrière lui sa vie ratée. Il n’y a pas de destination, il ne sait pas où il va, et seuls comptent les rencontres, le dessin et la littérature de langue russe, les échecs, et Yalta.
A l’image de l’existence du narrateur, à l’image d’une ex-URSS morcelée et en quête d’identité, le récit se cherche, les flashback se superposent. On a parfois l’impression de parcourir un carnet de croquis, sans trop savoir où ça nous mène.
J’ai beaucoup aimé l’ambiance envoûtante qui se dégage de ce livre, pourtant, il est assez déroutant. La trame principale est difficile à suivre. Il faut véritablement rentrer dans l’ambiance pour se laisser porter, il faut voir les couleurs et les traits qui se dessinent au fur et à mesure de l’histoire, sans être particulièrement demandeur d’explication. Cela n’est pas difficile, pourvu que l’on accepte de se laisser embarquer par la prose chatoyante d’Emmanuel Ruben.