Lola vit en Belgique, elle a une maman plutôt sympa mais protectrice, un beau-père cool qui l’a initié aux jeux vidéos, deux petits-frères, un père qui a choisi d’aller explorer et photographier le monde plutôt que de mener une petite vie bien tranquille et qui n’a plus donné signe de vie depuis 8 mois. Lola vit surtout en 2025. Les technologies ont évolué et les jeux virtuels se pratiquent avec un casque, un peu comme dans une réalité augmentée mais toujours plus fade et/ou insipide que la réalité. Sauf avec ALE 2100, un nouveau jeu que Lola est invitée à essayer en avant-première par Eo, pseudo d’un gamer avec qui elle a lié amitié.
ALE 2100 propose deux choses innovantes : d’une part une vision du futur basée sur les pires scénarios écologico-politico-environnementaux et d’autre part l’idée d’une interface (« Sensation ») qui permet aux joueurs de ressentir ce que vivent leurs avatars avec des degrés plus ou moins forts d’intensité. A la clef de ce test, pour l’équipe gagnante, composée de 3 joueurs, un chèque de 300.000 € que Lola compte bien remporter pour partir à la recherche de son père.
Après des débuts poussifs, l’histoire s’emballe admirablement au fil des missions réalisées par Lola (dont l’avatar s’appelle Waverider), Erik-Oliver (sont l’avatar est donc Eo) et un illustre inconnu (dont l’avatar est L’Emissaire), un grand black baraqué américain dont les réseaux d’influence dans la vraie vie sont mystérieux.
Sophie G. Winner entretient d’ailleurs plutôt bien le mystère autour des points clefs de son histoire : qui est L’émissaire et que vient-il faire dans ce test ? Qui est l’étranger Valens qui aide Lola et son équipe dans les missions ? Quel est le but d’ALE 2011 ? Qui est son créateur ? Qu’est-il arrivé à son père ? Est-ce ou non lié à ALE 2100, les sujets d’intérêts de l’un n’étant pas si éloignés que cela des sujets traités par l’autre ?
A travers des scénarios catastrophes bien pensés, Sophie G. Winner envisage un futur apocalyptique pour tirer une sonnette d’alarme avec des arguments qui mériteraient d’être un peu plus développés. Les réflexions socio-économiques ne sont pas le point fort de ce livre qui se lit avant tout comme un roman d’aventure avec un peu de romance alors qu’il se veut quelque chose de plus profond. Sophie G. Winner ne manque toutefois pas d’imagination pour propulser les joueurs dans un monde futuriste où les déserts africains sont devenus la fourrière mondiale, la forêt amazonienne a disparu, les gens sont ghettoïsés en fonction de leur apparence physique, la population américaine doit acheter don métier ou mourir, les populations chinoises doivent acheter leur vie au-delà de 50 ans ou mourir avant leur soixantième année,…
Roman d’anticipation aux ambitions affirmées, s’il est d’une lecture agréable et si on s’attache aux personnages et qu’on a clairement envie de connaître l’issue de cette aventure, il reste malgré tout un livre destiné à distraire, certes intelligemment, les adolescents en attirant leur attention sur les enjeux de la préservation de la planète et par là-même de notre bien-être.
Il y a un petit côté Inception dans la notion de personnes physiques qui vivent et ressentent dans leurs corps ce que leurs avatars font dans le jeu, un petit côté Lara Croft dans des missions où le combat vient se mêler à l’exploration, un petit côté Tekken dans des combats purs. Le projet bénéficie d’un site (www.ale2100.com) qui prolonge le travail de Sophie G. Winner et prouve qu’avec un peu de travail, ce livre pourrait faire un bon jeu.
Une lecture 2015 tout en douceur et facilité mais distrayante et apportant un éclairage intéressant et ludique, même s’il est parfois simpliste, sur le futur de notre planète et de nos sociétés.