Légende d’une vie de Stefan Zweig

Quatrième de couverture :

Quatre personnages se croisent : Leonore Franck, veuve du célèbre écrivain Karl Amadeus Franck, eur fils Friedrich, Bürstein, le biographe du maître et une mystérieuse femme qui s?avère être l’amour l’enfance du grand écrivain, celle à qui il a écrit des dizaines de pièces enflammées et dédié une pièce de théâtre que tout le monde croyait jusqu’alors perdue. Or cette femme détient les lettres et le manuscrit…Tout le génie de Zweig est de glisser du vaudeville classique à la pièce métaphysique sur la création.
Depuis la mort de l?écrivain, sa veuve, ainsi que le biographe, ont maquillé la réalité. Or quand Bürstein se repent, la légende de l’écrivain s’effondre, mais pour donner naissance à la véritable histoire d’une vie et d’un amour passionné. Légendes d’une vie est consacrée aux relations d’une famille et de l’?uvre que laisse un grand homme disparu. A-t-elle le droit de tout publier? Doit-elle censurer, couper, rectifier ?

 

Ma lecture :

 

Cette pièce de théâtre c’est l’histoire d’un voyage en train trop long pour se satisfaire des bouquins que j’avais emporté. Courir à un Relai lors d’une correspondance, attraper ce livre et se plonger dedans… Se laisser emporter dans le silence d’un wagon, s’en abstraire pour rêvasser devant les lumières glissant sur la vitre, faire durer le plaisir encore, l’étirer jalousement, et puis finalement l’achever devant la gare, en attendant que la ville s’éveille et le café ne s’ouvre.

Zweig, comme Dostoievski, se connaît. Sans complaisance, sans affection, mais sans honte non plus. Et ses personnages sont d’une humanité pure et simple, bien moins pleine de fioritures que toutes les phrases qui vont sortir de ma bouche avec un filet de bave en parlant de lui !

Un théâtre efficace, toujours, qui promène autour des figures phares (dont le père disparu), des personnages « annexes » qui permettent de mettre en relief, de jouer sur les silences, les non-dits, les mensonges réputés habiter toute famille, sans s’attarder en monologues fastidieux pour accéder à la complexité du protagoniste. Même si le lyrisme romantique n’est jamais loin… mais ça, c’est facile à corriger (j’adore corriger les grands auteurs B-) ) en inventant soi-même la mise-en-scène idéale !

Sur le fond… Difficile d’en dire la grandeur sans en dire le déroulé. Sur le phénomène de construction d’une « légende » et de tout ce qui s’y oublie… quitte à en neutraliser l’humanité et la rendre trop froide. Un fils face à l’image du père absent mais étouffant, de la mère bien présente ! un jeune adulte qui cherche à grandir en acceptant une histoire collective pour faire ses propres traces. Zweig psychologue des drames familiaux, Zweig sociologue de la bourgeoisie intellectuelle, Zweig sans mauvaise foi cette fois, et toujours plein de la tendresse qui fait si souvent défaut à l’intelligence (enfin, « défaut » est un bien grand mot !). Et au-delà de la naissance d’un adulte, celle d’un écrivain ; la contextualisation devrait ravir pas mal de livraddictiens, dans cette mise en abyme sensible ou cruelle

Je suis mauvais public. Mais j’ai été touchée. Parce que chacun a sans doute quelque chose à y lire en écho. Parce que j’allais retrouver mon frère. Parce que la sincérité sagace de Zweig rend sublime des êtres imparfaits.

En résumé : le théâtre c’est rapide et pas chiant à lire, et Zweig c’est une valeur sûre pour crâner en société… pourquoi vous en priver plus longtemps ?

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