Il est en ce monde un réseau traversé d’autoroutes, de routes secondaires, de chemins parallèles entrecroisés d’une multitude d’intersections et de connexions, autant de fils déployés sur l’immense toile du Web, autant d’informations se propulsant à la vitesse de la lumière, autant de sources venues de tous horizons, alimentant, d’un simple clic, une étroite collaboration entre la machine et l’humain.
Que ce soit au moyen de blogs, de médias citoyens, de sites alternatifs, l’internet reste le plus sûr moyen de combattre la généralisation des idées, les préjugés faute d’information, les amalgames issus de la méconnaissance des sujets.
Un cinquième pouvoir qui ouvre de nouvelles perspectives et nous incite à réfléchir par nous-mêmes, avant que d’autres ne le fassent à notre place.
Mon avis :
Si la quatrième de couverture laisse à penser que l’on s’apprête à s’abîmer dans une réflexion sur les pratiques d’Internet (« Un cinquième pouvoir qui ouvre de nouvelles perspectives et nous incite à réfléchir par nous-mêmes, avant que d’autres ne le fassent à notre place »), et en particulier celles des blogs, un petit coup d’œil sur le sommaire, rebaptisé « Navigation », introduit un doute.
Finalement, point de grande théorie sur l’Internet, mais plutôt une séance de travaux pratiques sur ce que peut apporter ce nouveau mode d’information. Cet ouvrage au titre surprenant est un recueil de vingt-deux chroniques de l’auteur sur un blog qui dépend d’un grand quotidien gratuit.
L’ensemble est organisé en quatre thèmes (« Femmes improbables », « Eternel », « Pourquoi eux ? », « Sociologie »). A mes yeux, ce sont davantage deux catégories de textes qui se dégagent : d’une part, les billets qui traitent de culture générale, dans une acceptation très large du terme, et d’autre part, ceux qui abordent ce que l’on nomme trivialement des sujets de société.
Les premiers sont plus que plaisants à lire. Ils sont documentés, bien construits et truffés de références précises, parfois même bibliographiques. Parmi ces textes, on trouve des biographies (des femmes telle Alexandra David-Néel, des personnages plus que connus comme Jim Morrison, mais aussi un poète médiéval – Omar Khayyâm – auquel Amin Maalouf a consacré un ouvrage), des retours sur la mythologie antique ou encore une description historique des rues de Paris. Ces billets nourrissent la culture du lecteur ou éveillent les souvenirs de lectures antérieures. Ils incitent à aller voir davantage par soi-même et illustrent ce que l’on attend souvent d’Internet, à savoir l’accès à des connaissances nouvelles.
En revanche, les textes qui proposent une réflexion sur des thèmes de société sont plus rébarbatifs. Ils s’efforcent d’organiser les poncifs sur chaque sujet (l’alcool ou l’amour pour n’en citer que deux). Le ton est plus moralisateur, parfois un peu larmoyant, le style moins incisif. On se prend à compter le nombre de pages restant avant la fin de cette resucée des discours maintes fois entendus à la radio ou lus dans les journaux. Et c’est là que la mansuétude du lecteur s’effrite. Alors il repère mieux ce qui nuit à la qualité des textes, les fautes d’orthographe ou de syntaxe qui sont un peu nombreuses. Il est par exemple dommage qu’une réflexion bien menée sur la religion soit desservie par l’oubli récurrent de la majuscule au mot Eglise, lorsqu’il désigne l’ensemble des fidèles ou les autorités ecclésiastiques catholiques – alors qu’avec une minuscule le même mot désigne le bâtiment religieux.
Malgré ces imperfections ponctuelles, la lecture de cet ouvrage laisse une impression générale satisfaisante. On se souvient davantage de la mise en perspective historique du jeu de Go ou de la réhabilitation d’Immanuel Velikovsky que de la litanie sur « les plus malheureux que nous ». Et il ne serait pas étonnant que le lecteur se laisse tenter par un détour sur le blog de l’auteur, histoire de découvrir d’autres de ses chroniques.
Je tiens à remercier les éditions Kyklos et Livraddict pour le partenariat qui a permis cette lecture.