Trilogie Millenium par Stieg Larsson

Millenium est une trilogie de romans policiers écrite par le suédois Stieg Larsson, ex-journaliste connu pour ses engagements contre l’extrémiste de droite et le racisme. Il meurt d’une crise cardiaque en 2004, mais remet auparavant ses livres à un éditeur qui les publie à titre posthume en 2005. La traduction française émerge dès 2006. Le succès est au rendez-vous, 2,5 millions d’exemplaires vendus en France et en tout, 10 millions dans 37 pays du monde (février 2009, source : cliquez ici) .

Les différents tomes s’intitulent : « Les hommes qui n’aimaient pas les femmes », « La fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette » et « La Reine dans le palais des courants d’air ».

Pour ceux qui ne connaissent pas l’œuvre, je vous invite à lire le synopsis du premier tome dans l’article de Jess ou à la page Wikipédia suivante : Cliquez ici).

Les présentations étant faites, l’article va désormais s’intéresser au cœur de l’intrigue et n’intéressera donc que les personnes ayant lu la trilogie. !! SPOILERS !! (là, on ne pourra pas dire que vous n’avez pas été prévenus)

Je dois tout d’abord vous avouer une chose : quand Jess a acheté ces livres, je me demandais si elle n’était pas tombée sur la tête, je n’aimais pas du tout ses couvertures noires et rouges déprimantes. La première est la pire avec cette tête de jeune fille au regard perçant dans une ambiance assez glauque. Ensuite, lors de sa lecture, Jess n’arrêtait pas de dire que c’était génial, qu’il fallait même aller voir le film. J’ai regardé la bande-annonce, je ne comprenais pas, c’était toujours glauque… Un film suédois de surcroit, sans acteurs connus, ça m’excitait pas plus que cela. Mais malgré tout, un beau jour de printemps, sur un coup de tête, j’ai décidé de me jeter dedans !

« Plouf ! » que ça a fait, je barbotais comme un fou dans ces longues descriptions d’intrigue économico-politique obscure au côté de Mikael Blomkvist. Mais au bout de quelques dizaines de pages, je me rendais compte que toutes ces petites histoires imbriquées les unes dans les autres n’étaient finalement pas si ennuyeuses que ça ! C’est donc là que j’ai pris conscience que Larsson était un bon écrivain, ou du moins qu’il y avait une connexion psychique entre son style et mon esprit (la dernière fois que j’ai eu cet éclat, c’était pour Dan Brown). Mais il fallait encore que l’histoire me plaise jusqu’au bout… (Roulements de tambours) et ce fut heureusement le cas ! Ces livres offrent des moments d’excitation et d’ahurissement assez étrange !

Il y a déjà une chose à retenir de cette trilogie. Larsson, qu’importe le tome, suit un schéma assez simple : d’abord, il fait une première partie ennuyeuse (ou du moins, sans action, sans coup d’éclat, sans rebondissement) puis il monte en puissance. Pour lui, qu’importe que la fin du tome 2 se finisse sur les chapeaux de roues, le tome 3 reprend calmement et… se finit sur les chapeaux de roues. Il maitrise aussi parfaitement les rebondissements. Sa technique est de donner une information capitale au milieu d’un dialogue, sans véritable préparation. Il nous prend en quelque sorte à contre-pied, je ne m’attendais pas du tout à cela. Exemple : dans le 2ème tome, on a la confirmation d’un coup que ce n’est pas Lisbeth qui a tué les journalistes et l’avocat Bjurman, mais son frère Nierdemann.

Les personnages sont intéressants, même si on ne s’identifie pas trop à eux, on peut les comprendre. On peut même parler de héros dans le sens où ils ont vraiment des destins incroyables et hors-normes. Lisbeth est quand même une asociale avec une mémoire photographique et une intelligence qui lui permettent de résoudre des équations extrêmement complexes et d’être l’une des plus grandes hackeuses du monde. Tout cela lui permettra, dès la fin du tome 1, de voler un milliardaire véreux et d’ainsi arrêter de vivre dans le besoin (tout le monde rêve de ça ! c’est comme gagner au loto !). Mikael Blomkvist, de son côté, tombe deux fois de suite, sur des affaires extrêmement importantes qui le font devenir meilleur journaliste de Suède. On joue avec l’excellence là.

Pour revenir sur l’argent de Wennerström, on voit grâce à cet exemple que le tome 1 reste quand même assez lié avec le dyptique que forment les tomes 2 et 3. Sans cela, beaucoup de choses n’auraient pas été possibles. Principalement, Lisbeth n’aurait pas pu habiter à l’insu de tout le monde un appartement bourgeois de Stockholm et inviter sa copine Myriam Wu à habiter son ancien appartement (cela retarde son arrestation et lui permet de rester tranquille pendant quelques semaines). Mais il y a aussi l’argent qu’elle va donner pour soigner son ancien tuteur qu’elle croyait mort, l’argent qu’elle donne à ses collègues de la Hacker Republic… Autre exemple de liaison entre tome 1 et 2, le journal Millenium profite aussi de l’affaire Wennerström, c’est désormais un journal avec une bonne réputation et une bonne crédibilité. Harriet Vanger apparaît également dans le tome 2 comme membre du CA. Erika Verger profitera de cela pour être approchée par le plus grand journal de Suède. Une histoire secondaire un peu étrange dans le tome 2 d’ailleurs, on sait juste qu’elle veut partir, mais elle ne dit rien. Cela n’intervient qu’au début du tome 3. A l’arrivée, elle travaille beaucoup, se bat avec les employés, découvre grâce à Henri Cortez que son boss est un salaud et enfin, elle est traquée par un fou ! C’est un peu tiré par les cheveux même si Larsson arrive à rendre ça intéressant. Sous-exploitée dans le tome 2, elle revient en tout cas en forme dans le tome 3 !

En parlant de tome, j’aimerais aussi discuter du « ton » unique à chaque tome. Je ne sais pas si chacun a ressenti ça. En fait, ce ton est donné par les 2 personnages principaux, Mikael et Lisbeth. Dans le premier, ils ne se connaissent pas, on les découvre. Il part sur une île au fin fond du pays dans un froid polaire, elle doit gérer un tuteur violeur. Ce premier tome est le plus sombre de la trilogie à mes yeux. Ce huit-clos et cette histoire vieille de 40 ans donnent un aspect noir à la série. Seul l’aspect hackeur de Lisbeth et l’affaire W. raccrochent un peu à la réalité. Dans le tome 2, on est vraiment dans un thriller (avec ces meurtres et cette traque policière et médiatique) et le thème de fond est le passé de Lisbeth. C’est plus rythmé, plus surprenant et le nombre de personnages est impressionnant, on sent que ça ne va pas se finir en 600 pages. L’aspect policier est très présent au contraire du tome suivant où c’est la justice qui prime. Le tome 3 tourne aussi beaucoup autour du thème de l’espionnage et du complot (avec toute l’histoire de la SAPO vs Millenium/Salander) alors que le deuxième était porté sur la famille (de Lisbeth et Zalachenko). Pour résumer : tome 1 : polar à huit-clos ; tome 2 : thriller ; tome 3 : roman d’espionnage.

Ces tons différents mettent en évidence ce renouvèlement constant de l’intrigue. On est sous l’emprise du récit de bout en bout. Aucun tome ne se présente comme le remake du précédent. On saura peut-être un jour le contenu du manuscrit du tome 4 mais à l’heure actuelle, j’ai énormément du mal à imaginer une suite aux aventures de Lisbeth et Mikael. Les 2 derniers tomes étaient tellement proches des personnages et ils avaient une telle proportion dramatique qu’on ne pourrait faire mieux. Le tome 4 aurait, j’imagine, ressemblé au tome 1 avec une histoire indépendante que Mikael et Lisbeth auraient décortiqué ensemble. Selon la « légende », Millenium aurait compté de 8 à 10 tomes (Source : http://www.actualitte.com/dossiers/311-Millenium-10-tomes-Larsson-maniaque.htm?p=2) et toujours selon cette source, « les thématiques sur l’extrême droite seraient arrivées dans les épisodes suivants ». Mais tout cela n’est que spéculation et de toute manière, le maitre est mort. On peut sans doute l’imiter mais pas l’égaler. Son sens du détail et de la mise en place de l’intrigue est exceptionnelle et Millenium restera à jamais une trilogie que j’ai adoré lire. A la fois simple dans l’écriture, complexe dans l’intrigue et efficace dans l’action, Millenium a réussi à renouveler le héros journaliste. Cette fois-ci, il est sans pouvoir, ne s’appelle pas Clark Kent et ne porte pas de collants quand il sort le soir; il s’appelle simplement Mikael Blomkvist.

Article original publié le 28 Août

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2 commentaires

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  1. Une belle chronique, et un drôle de commentaire !
    J’aime beaucoup ton analyse, et tu as mis des mots sur le « ton » différent de chaque bouquin…

  2. Pourquoi cette oeuvre s’intitule Millénium ?
    J’ai 20 lignes à faire sur ce sujet en français.
    Merci pour votre aide. 🙂