La Douane Volante, François Place

Quatrième de Couverture

Bretagne, 1914. La guerre menace. Une nuit, la charrette de la mort s’arrête devant la maison de Gwen le Tousseux, le jeune orphelin. C’est lui que vient chercher l’Ankou, pour l’emmener au pays dont on ne revient jamais… Quand Gwen se réveille, il est passé de l’autre côté, dans un monde comme surgi du passé. Dans ce pays étrange, effrayant mais fascinant, dominé par la douane volante, il va vivre des aventures extraordinaires. Gwen l’Egaré parviendra-t-il à retrouver sa terre natale ou son destin sera-t-il à jamais lié à Jorn, le redoutable officier de la douane volante? Une fresque magnifique, entre roman fantastique et récit initiatique, dans laquelle François Place révèle toute la dimension de son talent d’écrivain. Avec Gwen le Tousseux, laissez-vous emporter au-delà des frontières du réel et du temps.

Pour la première fois depuis bien longtemps, je ne sais pas par où commencer mon billet. J’ai lu « La douane volante » quasiment d’une traite, incapable de reposer le roman avant de l’avoir fini et en en ressortant sonnée, la tête remplie des brumes bretonnes. Inutile donc de dire que j’ai aimé, c’est évident, mais je ne sais comment parler de ce roman si poignant. Je vais donc commencer par le livre lui -même en tant qu’objet. Je le trouve vraiment de toute beauté. Le dessin de couverture de François Place lui-même, rappelant ainsi son passé d’illustrateur, le titre en surépaisseur et la qualité de l’impression en fait un objet que l’on aime manipuler. Cela peut paraître idiot, mais cela ajoute sans conteste au plaisir de la lecture.

Gwen, pauvre jeune pécheur de constitution maladive (d’où son surnom de Gwen le tousseux), rencontre un « rebouteux » qui lui sauve la vie. Ce « rebouteux » va le prendre sous son aile et lui apprendre les rudiments du métier, avant de mourir subitement. Nous sommes à quelques jours de la première guerre mondiale. A peu près au moment où la guerre est déclarée, Gwen se retrouve emporté dans un monde parallèle dans la  grande charrette noire de l’Ankou lui-même. Il n’a aucune idée de l’endroit où il est, il va devoir y apprendre très vite à survivre. Il va d’abord rencontrer Jorn. Jorn qui appartient justement à cette douane volante, sorte de police aux pouvoirs quasi totalitaires. Jorn aux deux visages, parfois mesquin et brutal, parfois généreux et héroïque et qui finalement va jouer le rôle du père absent. Gwen va aussi devoir lutter contre son ignorance, continuer à développer ses dons de « rebouteux », apprendre la médecine. En cela il sera aidé aussi par des « professeurs » hors du commun. Il découvrira les premières prémices de l’amour. Il va grandir…

Ce roman peut se lire à plusieurs niveaux. D’abord c’est un roman fantastique et finalement il peut se lire en tant que tel sans forcément chercher plus loin et c’est déjà un régal. Mais c’est aussi l’initiation d’un jeune, qui va étudier,  lutter contre l’ordre établi, se rebeller, fuguer, aimer, frôler les interdits et être trahi. Il en ressortira grandi et adulte, mais à quel prix ?

On plonge dans ce roman, comme on plonge dans la brume de Bretagne. On est imprégné par ce monde imaginaire peuplé de démons et d’humains. On vit dans cet univers hors du temps au même rythme que Gwen : j’ai eu peur avec lui, j’ai ressenti les mêmes indignations, cette impression de piège, de nasse, j’ai lutté avec lui pour en sortir et j’ai refermé le livre épuisée et éblouie. L’histoire est pleine de poésie, elle est dense et fluide à la fois. L’auteur est un vrai conteur qui vous transporte dans un autre monde qui fait penser à certains anciens tableaux hollandais. L’ambiance y est sombre,  parfois étouffante. Un monde dur dans lequel la médecine fait penser à Molière, dans lequel les amis ne sont pas toujours ceux que l’on pense et où les ennemis se révèlent être finalement plutôt bien attentionnés.

Quel est ce monde ? Est-ce un pays imaginaire crée de toutes pièces par Gwen pour échapper aux horreurs de la guerre ? Est-ce juste un reflet de la folie et des blessures produites par cette guerre meurtrière ?  Un monde qui engloutit les jeunes comme ils ont été « avalés » et détruits entre 1914 et 1918 ? Peut-être…ou pas ! En tout cas on ne sort pas indemne de ce roman vraiment hors du commun.
Je ne peux que le conseiller à tous, jeunes ou adultes, c’est vraiment un gros coup de cœur.

Un très grand merci à Gallimard Jeunesse de m’avoir fait découvrir ce livre exceptionnel à travers un partenariat avec Livraddict.

Histoire d’un défi : les lectures que l’on ne s’imaginerait pas lire

Il y a des jours comme cela, tu te réveilles, tu t’étires et… ta tête fourmille d’idées. Ce fut le cas le 21 Janvier de cette année.

Tout a commencé ainsi, sur le forum livraddict (lien vers le sujet) :

Hier m’est venu à l’esprit un petit jeu/défi que je trouverais à la fois amusant et intéressant. Voilà le but : comme tout le monde, j’imagine que vous avez des catégories de lectures que vous affectionnez plus que d’autres. A l’inverse, certaines ne vous donnent vraiment pas envie…

J’ai toujours eu pour principe de ne rien juger tant que je ne connaissais pas et de faire mes opinions moi-même sur ce que je lis, pense etc. Cependant, j’ai toujours été réfractaire aux romans à l’eau de rose et  aux biographies/autobiographies.

Celui ou celle qui va répondre à ce message doit choisir deux livres, un dans chaque catégorie, et me défier pour que je les lise.

A son tour celui qui défie doit exposer deux catégories de livres qu’il n’aime pas et sous forme de chaine, chacun va défier le précédent en attendant de se faire défier…

L’engouement, pour mon plus grand plaisir, s’est vite ressenti. Nous sommes arrivés dès la première journée à treize participants. Notre petit groupe a alors soumis l’idée qu’il fallait un petit logo assorti au challenge. Mes compétences en DAO étant plus que limitées, j’ai demandé sur le topic si quelqu’un pouvait s’en chargé.

http://img697.imageshack.us/img697/518/mondfi.th.jpg

Aily a alors proposé ce petit logo, simple, efficace qui a ravi tout le monde et a amené par la suite un nouveau flot de participants.

Soutenu par Jess, il fallait cloturer le défi par une date de fin d’inscription. J’ai préféré l’idée d’un nombre de « défieurs » maximum à savoir quarante.

Après quelques moments où le doute s’installait sur si oui ou non, nous allions atteindre nos quarante participants, nous l’avons atteint aujourd’hui : Heclea fut l’ultime candidate que j’ai à mon tour défiée. La boucle est bouclée, bravo à tous.

Récapitulatif des participants :

lexounett222 <==100choses pour Sept jours pour une éternité de Levy et Jan Karski de Haenel

100choses <== Alexielle pour Confessions d’une accroc du shopping de Kinsella et La Chanson de Rolland

Alexielle <== Wilhelmina pour Destination Cerveau d’Asimov et Agatha Christie, duchesse de la mort de Rivière

Wilhelmina <== Jenta3 pour La Chatelaine de Wildfell Hall de Brontë et Les Tribulations de tiffany Trott de Wolff

Jenta3 <== Livresque pour Cujo de King et Travailler avec des Cons de Tonvoisin Debureau (j’adore^^)

Livresque <== Maureen pour Le portrait de Dorian Gray d’Oscar Wilde et Farheineit 451 de Bradbury

Maureen <== lounapil pour Livre des Trépassés de Preston et Child et L’Accompagnatrice de Berberova

lounapil <== mariiine pour Parce que je t’aime de Musso et Mes chères études de Laura D.

mariiine <== cacahuete pour Les Rats de Herbert J. et livre de Harlequin (besoin de précision)

cacahuete <== flof13 pour Angélique, marquise des Anges de Golon et Les Dames du Lacs de Zimmer Bradley

folf13 <== Bookine pour People or not People et les Mémoires de Jean Monnet

Bookine <== everkhorus pour Chroniques martiennes de Bradbury et Le mystère de la chambre jaune de Leroux

evertkhorus <== Miss Spooky Muffin pour Le village aux huit tombes de Yokomiso Seichi et Chasseuse de la nuit, Tome 1 : Au bord de la tombe de Jeaniene Frost

Miss Spooky Muffin <== Véro pour The gun seller by Hugh Laurie et Marie Antoinette by Stefan Zweig

Véro <== Aily pour Mercy Thompson, tome 1 : L’appel de la lune de Patricia Briggs et Lexi Smart à la mémoire qui flanche, de Sophie Kinsella

Aily <== mrs pepys pour Crime de l’Orient express de Christie et La pierre et le sabre

mrs pepys <== Lily pour Les Bannis & les Proscrits, tome 1 Le feu de la sorcière de James Clemens et La communauté du sud, tome 1 : quand le danger rôde de Charlaine Harris

Lily <== Grazyel pour Le dernier jour d’un condamné, d’Hugo et Touthankhamon, L’ultime secret de Jacq

Grazyel <== Typhanie pour Gone Baby Gone de Denis Lehane et Les ritals de Cavanna

Typhanie <== Nathalie pour L’appel de la lune de Patricia Briggs et Kiss Kiss de Roald Dahl

Nathalie <== Azariel87 pour Tommyknockers de Stephen King et Niourk de Stephan Wul

Azariel87 <== venzo2b pour La maison des feuilles de Mark Z. Danielewski et Innocent de Harlan Coben

venzo2b <== Matilda pour Le meurtre de Roger Acroyd d’Agatha Christie et La passion Lippi de Sophie Chauveau

Matila <== little.cloud pour Blonde attitude de Plum Sykes et Le parfum d’Adam de Jean Christophe Rufin

little.cloud <== Ethernya pour W ou le Souvenir d’enfance de George Perec et Plaisirs Coupables de Laurell K Hamilton

Ethernya <== Cocola pour Pars vite et reviens tard, de Fred Vargas et Des fleurs pour Algernon, de Daniel Keyes

Cocola <== Babycakes pour Les enchantements d’Ambremer de Pierre Pevel et Pour qui sonne le glas d’Hemingway

Babycakes <== Frankie pour Les Fleurs du Mal de Beaudelaire et Les mains sales de Sartre

Frankie <== Evy pour Marie sans terre d’Yves Jacob et L’Irrégulière ou mon itinéraire Chanel de Edmonde Charles-Roux

Evy ==> Lolo pour Madame Bovary de Gustave Flaubert et Dans les bois éternels de Fred Vargas

Lolo <== Elora pour Hannibal Lecter : Les origines du mal de Thomas Harris et Brûlante liaison de Sarah Mayberry

Elora <== Sita pour Petite Anglaise de Catherine Sanderson et Coraline de Neil Gaiman.

Sita <== Youpinous pour Terre des hommes de Saint-Exupery  et Le journal de Bridget Jones d’Helen Fielding

Youpinous <== Florel pour Un horizon de cendre de Jean Pierre Andrevon et Journal d’un vampire de L.J. Smith

Florel <== illyria pour People or not People de Lauren Weisberger et Charlie de Stephen King

Illyria <== lucie 11 pour George Orwell 1984 et Shining de Stephen King

lucie11 <== Lelf pour Neverwhere de Neil Gaiman et Histoires Extraordinaires d’Edgar Poe

Lelf <== Pickwick pour Ma vie privée sur internet de Caroll Matthews et Mary Stuart par Stefan Zweig

Pickwick <== Heclea pour Bel Ami de Maupassant et pour Madame Marguerite de Roberto Athayde

Heclea <== lexounet222 pour Le Cycle d’Ender, tome 1 : La Stratégie d’Ender, d’Orson Scott Scard et Eternalis de Raymond Khoury

« Les pensées de Kurgâr-le-Sage », Eden Yôqtan

Ce livre a été lu dans le cadre d’un partenariat entre Livraddict et les éditions Abel Bécanes. Je les remercie tous deux chaleureusement et je suis très contente d’avoir découvert cette nouvelle maison d’édition.

Résumé

D’abord un mot des Tcherkhâns. Ils habitèrent, au milieu du IIIe millénaire avant notre ère, la plaine centrale de l’Europe. Sans doute venaient-ils des hauts plateaux indiens ou tibétains… Nomades à l’origine, ils finirent par se sédentariser et fondèrent, sur la route de la soie, un des plus importants caravansérails. Marco Polo himself, peu suspect de baratinage, l’atteste dans son Livre des Merveilles… Les dissensions internes mirent à bas cette belle civilisation dont le fleuron fut le Sage Kurgâr. À une époque où seule régnait la force, il tenta d’imposer la sérénité de la réflexion et du bon sens. Ses jugements demeurèrent aussi célèbres que celui de Salomon. Son enseignement se transmit oralement jusqu’à ce qu’un scribe, aux temps anciens mais un peu moins, ne couchât tout ça, paf !, sur le papier. Le manuscrit trouvé par Yôgtan a connu, tel le Saint Suaire, nombre d’avatars dans le monde anglo-saxon. Curieusement, avant le lumineux travail de Wallet, Éloy et Hernandez (de l’association Chés Bestiaux d’Picards), la France n’avait jamais eu vent d’un tel monument de la pensée mondiale. Les fins chercheurs pourront trouver quelques allusions bien senties au souverain tcherkhân chez Aristote, Pascal, Kant, Bernard-Henri Lévy (pas sûr) et chez Woody Allen. Ce qui fait quand même beaucoup pour un inconnu, pas vrai ?

Mes impressions

J’aime découvrir de nouveaux éditeurs et savoir ce qui se fait aujourd’hui dans le paysage éditorial français. Je n’ai donc pas hésité quand j’ai vu ce nouveau partenariat avec Abel Bécanes. J’avoue avoir survolé les résumés dans l’excitation où j’étais de participer à un nouveau partenariat. J’ai donc choisi cet ouvrage, pensant recevoir un ouvrage très sérieux sur une civilisation que je ne connaissais pas… Cela m’apprendra à mieux lire les résumés des livres et à ne pas me précipiter !

J’ai donc reçu dans ma boîte aux lettres ce beau petit livre soigné, à la jolie couverture et agréable à tenir en main. Je me suis immédiatement lancée dans sa lecture et dès la première page je fus perplexe. Quelque chose n’allait pas. Cela n’était pas ce à quoi je m’attendais, ce n’était pas des contes avec une morale réfléchie et sage. C’était tout autre chose. Un livre humoristique, une parodie de ces fameux contes que j’appréciais tant. Après m’être rendue compte de mon erreur et m’être habituée à ce style, j’ai pu enfin mieux en apprécier la lecture et la portée.

Les contes sont donc très courts, une page la plupart du temps, complétés le plus souvent par des commentaires en bas de page. Le tout est très fluide, très aéré et se lit très rapidement. On suit donc Kurgâr-le-Sage, le chef des Tcherkâns au fil de ses réflexions et questionnements, le plus souvent absurdes et inutiles. Mais c’est ce qui fait l’humour de cet ouvrage. Les piques, l’ironie et les références à notre époque sont assez hilarantes et j’avoue avoir bien ri à certains passages. Mais globalement l’ouvrage a pour moi l’humour bien trop gras et est trop porté sur le « pipi-caca-prout »… surtout sur le « prout » d’ailleurs. Au fil des pages, l’humour est devenu pour moi redondant, et je me suis vraiment ennuyé à la fin. Finalement, j’en suis ressortie en me disant que cette lecture ne m’avait pas apporté grand-chose, à part à rire de temps en temps au début.

Mais l’illusion est partfaite : références, notes de bas de page, bibliographie, dossier… moi-même j’y ai cru ! Bon d’accord je suis un vrai boulet !!!

Une lecture facile donc, à l’humour trop gras pour moi mais qui plaira sans doute à d’autres. En tout cas, Abel Bécanes fait graphiquement de beaux ouvrages.

Ma note : 2/5

Fantômes d’hiver de Kate Mosse

Un grand MERCI aux  Editions JC Lattès ainsi qu’à Livraddict pour m’avoir donnée l’opportunité de lire ce livre!

Editions : JC Lattès / Paru en : 2010 / Pages : 264

Auteure : Née dans le Sussex en 1961, Kate Mosse fait ses classes au Chichester High School et au New College, d’Oxford. C’est là qu’elle rencontre son futur mari, Greg Mosse. Après avoir obtenu son diplôme, elle travaille pendant sept ans dans l’édition. En 1996, elle publie son premier roman, Eskimo Kissing, suivi en 1998 par Crucifix Lane. De 1998 à 2001, elle occupe le poste de directrice exécutive du Chichester Festival Theatre. Parallèlement, elle poursuit ses recherches pour son nouveau roman. En 2005, elle connait un succès international avec son roman Labyrinthe, une histoire d’aventure se déroulant au Moyen Âge et dans le présent avec pour cadre principal la Cité et la ville de Carcassonne où elle réside également. En 2006, elle remporte un British Book Award pour son livre Labyrinthe dans la catégorie « Richard & Judy’s Best Read ». En octobre 2007, elle publie son dernier roman, Sépulcre.

Synopsis : La Grande Guerre a anéanti une génération tout entière, fauchée à la fleur de l’âge… Dans le cas de Freddie Watson, un jeune Anglais du Sussex, elle lui a pris son frère bien-aimé et, ce faisant, lui a volé la paix de l’esprit. Hanté par cette disparition, il erre sans savoir comment échapper à cette douleur qui le paralyse. Durant l’hiver 1928, Freddie voyage dans le sud-ouest de la France, une autre région qui a vu couler trop de sang au cours des siècles, quand sa voiture quitte la route. Encore sous le choc, il s’enfonce en chancelant dans les bois et trouve refuge dans un village isolé. Là, lors d’une étrange soirée, il rencontre Fabrissa, une belle jeune femme qui pleure elle aussi une génération perdue. Au cours d’une seule et même nuit, Fabrissa et Freddie se confient mutuellement leur histoire. Le lendemain, Freddie se retrouvera devant un mystère déchirant dont lui seul détient la clé.

Mon avis : Ce livre avait tout pour me plaire, et ce dès les premières phrases, dès le premier chapitre. Propulsée dans le sud-ouest de la France, région que je chéris puisque j’y ai vécu six belles années, puis dans une librairie de livres anciens, une petit boutique comme je les affectionne avec une ambiance si particulière, je ne pouvais que me sentir chez moi, totalement à l’aise dès les premières pages de ce roman.

Les phrases me sont apparues simples, fluides, courtes et étonnamment agréables à lire. Le style rapide m’a donné l’impression d’un rythme toujours présent, parfois haletant mais jamais oppressant. Je me suis sentie entraînée avec le personnage principal, Freddie, dans une Ariège hivernale, belle et mystérieuse, parfois ténébreuse. Je n’ai donc jamais eu l’impression de latences, même dans les descriptions (qui sont par définition comme un arrêt sur image, passives) qui se révèlent vivantes et impénétrables, notamment en ce qui concerne le village fictif de Néans.


Ce petit village est d’ailleurs étonnamment captivant et mystérieux, il reflète parfaitement ses habitants, tout aussi captivants, tout aussi mystérieux. Ce petit monde, perdu dans les Pyrénées et empli de secret ne m’a pourtant jamais donnée de frissons. Au contraire j’ai ressenti une énorme tendresse et affection ainsi qu’un intérêt toujours grandissant pour ces habitants et leur village, dès les premiers instants.

J’ai vraiment passé un agréable moment en compagnie de ce roman. Je dois d’ailleurs ajouter que j’ai été ravie d’y trouver des illustrations en noir et blanc dispersées au fil des pages. Elles participent grandement à l’atmosphère de l’histoire et elles m’ont rappelée cette joie que me procuraient les livres pour jeunesse que je lisais petite, toujours parsemés d’illustrations. Elles ont également réveillé ma passion pour le dessin et la peinture au sein de cette autre passion que j’ai pour la lecture.

C’est donc un livre que je recommande, une histoire bien menée, simple, belle et émouvante, au sein d’une région peu connue sous cet angle et teintée de l’histoire bien réelle des derniers cathares…

« Le vieil hiver est de retour
Il tourne et vire sur nos chemins
Sa blanche neige recouvre tout
Le Cers gémit dans les branches des pins »

Le gardien du testament, de Eric Van Lustbader

Mise en bouche : A la mort de son père, dans des circonstances plus que troublantes, Braverman Shaw se trouve investi d’une étrange quête et plongé dans un monde aux dangers innombrables. C’est enfin l’heure pour lui de mettre en pratique les enseignements de son père.

Le gardien du testament est qualifié de thriller, mais il est bien plus que cela.

C’est un roman d’aventures où l’action est présente, entre courses poursuites et luttes au corps à corps. L’intrigue toute entière repose sur une quête mystique, celle du « testament » mentionné dans le titre. Les rencontres et des découvertes faites par Brav Shaw impriment un rythme enlevé au récit, tenant en haleine le lecteur à coup de rebondissements et de retournements de situation.

C’est aussi un roman d’éducation, où le héros se découvre à mesure que sa quête avance. De surprises en déceptions, on le voit devenir l’homme dont son père avait rêvé, celui qui prend conscience de la lourde mission qui lui incombe et qui ne manque pas de lui susciter des ennemis. Il endosse progressivement son rôle de gardien du testament.

C’est encore un guide de voyage dans la Méditerranée médiévale, à la découverte de Venise et des vestiges de l’empire byzantin, à Trabzon. L’auteur semble prendre plaisir à décrire les paysages urbains où demeurent, sous la forme de bâtiments ou, plus furtivement, d’impressions, le souvenir des splendeurs d’autrefois.

La plume d’Eric Van Lustbader (mais aussi celle de son traducteur) est assez agréable. Elle se plait autant au rythme haletant de l’action, qu’à celui, plus posé, de la description ou de la plongée dans les souvenirs du héros. On pourra néanmoins lui reprocher sa précision excessive dans la peinture des combats : est-il vraiment indispensable de décrire par le menu tous les gestes des personnages lorsqu’ils se battent ?

« Brav se glissa sous ses bras levés et lui enfonça un genou dans l’aine. Tandis que le Russe se pliait en deux, Brav, du même genou, le frappa au menton : sa tête bascula en arrière et le jeune homme le frappa à la tempe. » etc., etc.

Le temps paraît alors un peu long.

Enfin, c’est avec l’objet même de la quête que le bât blesse. Il est d’abord annoncé clairement très tôt (dans le premier tiers du livre), ce qui gâche le mystère. On aurait aimé qu’il soit dévoilé plus progressivement. Et puis, le choix du but de la quête est, à mon avis, un peu abracadabrant. Si le Da Vinci Code jouait la carte du mystique provocateur, Le Gardien du Testament n’a rien à lui envier dans le domaine : la vraisemblance de cette quête est quasi inexistante. Malgré la notice pseudo historique de la fin du livre, la énième théorie du complot sur laquelle reposent le fameux testament et ce qui l’accompagne manquent cruellement d’originalité.

Si l’effort d’écriture, de construction de l’intrigue et de travail sur les personnages m’a séduite, j’ai été déçue par l’élément central du mystère. Il n’en reste pas moins que, ayant pris mon parti de ce choix de l’auteur, j’ai pris plaisir à suivre Brav Shaw dans son enquête d’une rive à l’autre de la Méditerranée.

Tous mes remerciements aux éditions de Livre de poche qui ont permis cette lecture, en partenariat avec Livraddict.