Body de Harry Crews

Body, de Harry Crews
306 pages, Folio (Policier) 2017
Traduit de l’américain par Philippe Rouard

4e de couverture :

« Elle s’appelait Shereel Dupont, ce qui n’était pas son vrai nom. Trois mois qu’elle n’avait pas eu ses règles, mais elle n’était pas enceinte. Non, c’était mieux et pire que ça. C’était la faute au bodybuilding… » La faute aux protéines en poudre, aux régimes sans eau et aux développés-couchés sous une barre chargée de fonte. Le concours pour être Miss Cosmos se gagne dans le moindre détail. Russel Morgan, lui-même retiré des compétitions, ne laissera personne lui dérober le titre. Personne ne doit voir sa protégée. Ni le fiancé revenu du Vietnam, ni sa famille de ploucs complètement cinglée, encore moins les concurrents. Il n’y a pas de pitié. Juste le sacre et la beauté des corps. Juste ces cinq cents terribles grammes en trop pour être couronnée.

Mon avis :

Cette réédition d’un roman de 1990 a attiré mon attention notamment par le logo « Folio Policier » de la couverture. Amateurs de polar, passez pourtant votre chemin, il n’y a pas l’ombre d’une enquête policière dans ce roman – Folio a visiblement décidé que les « romans noirs », les « thrillers » et les « enquêtes » pouvaient se regrouper sous cette appellation un peu trompeuse de « Policier ».

J’ai donc passé une bonne partie du livre à attendre avec impatience le tournant policier de l’intrigue, mais ça ne m’a pas empêchée de passer un sacré bon moment avec cette plongée sarcastique dans l’univers du bodybuilding qui faisait fureur à l’époque. Sarcastique, parce que muscles saillants, compétitions acharnées et dopage invétéré se retrouvent victimes d’un télescopage improbable avec une famille de ploucs débarquée de sa campagne américaine la plus profonde. Le contraste entre ces deux mondes aux antipodes l’un de l’autre fait ressortir tous les défauts de chacun. Quand une bande de rednecks arriérés déboule dans le temple de la perfection corporelle, ça fait des étincelles jusqu’à la dernière page. Et pourtant, le contact se noue, là encore de la plus improbable des manières.

Mais derrière cet assaut de ridicule à outrance et de personnages tous plus caricaturaux les uns que les autres, l’auteur pose l’air de rien quelques questions qui tuent… Peut-on échapper à ses origines sociales ? La communication est-elle possible entre deux univers apparemment incompatibles ? Quelle est la place de la femme dans cet univers en apparence égalitaire, mais où ce sont toujours des hommes qui jugent les candidates ? Jusqu’où peut-on pousser cet acharnement à sculpter son corps selon un idéal inaccessible, quelle image de soi peut-on avoir, que se passe-t-il dans la tête de ces êtres au physique quasi extraterrestre qu’on imagine bien volontiers aussi stupides qu’ils sont musclés ?

C’est dans les dernières pages que le drame qui se nouait au fil des chapitres se déploie dans toute sa gravité, avec une énième surprise. Au final, pas de polar, mais un vrai roman noir, donc, et un bon moment de lecture. Merci Folio et L@ pour cette lecture inattendue !

Alderamin on the Sky de Bokuto Uno

Auteur : Bokuto Uno
Éditions : Ototo (Seinen)
Nombre de pages : 160 pages
Année de parution : 2017

Résumé :

« Alors que l’empire de Katjvarna est en guerre, un jeune homme s’apprête à passer l’examen d’officier à contrecœur. Son nom est Ikta Solork et sa réputation de flemmard n’est plus à faire, mais un marché avec son amie Yatorishino Igsem le pousse à se prêter au jeu. En échange de son aide, Yatori lui trouvera un poste à la bibliothèque impériale. Cet examen deviendra la première pierre de sa légende. Ainsi débute la légende de l’invincible général oisif ! »

Ma critique :

Je tiens à remercier Livraddict, et les éditions Ototo pour cet envoi et ce service-presse !
Je suis une fan de couvertures,et je suis dans ma phase manga..ce livre m’a tapé dans l’œil, une femme guerrière et un homme mystérieux..Le résumé, m’a aussi plu, alors je ne pu que postuler à ce partenariat !

J’ai commencé la lecture de mangas, depuis moins d’un an et j’ai voulu découvrir ce qui se cachait derrière ce titre, une chose est sûre : les dessins sont superbes ! Taika Kawakami a vraiment fait du bon travail. Les personnages en plus d’être beaux, sont travaillés de par le caractère. Nous aurons des personnages impulsifs allant à l’extrême , de quoi rendre distrayante cette histoire !

L’histoire débute par la connaissance de deux personnages clé: Ikta, un jeune homme qui aime ne rien faire de ses journées, amoureux des femmes à fortes poitrines et Yatorishino Igsem un personnage féminin au tempérament aussi enflammé que sa crinière.On apprend qu’Ikta passera un accord avec Yatori, s’il l’aide pour l’examen elle lui trouvera un poste à la bibliothèque impériale, un moyen pour lui d’échapper à la guerre. Ils travailleront d’arrache-pied et redoubleront leurs efforts pour être sélectionnés afin de poursuivre le concours des officiers. Des semaines plus tard, le concours commencera et chaque épreuves seront réussites haut la main ! Ce qui m’a amusée fût les réactions d’ennui d’Ikta sur les différents sujets. Ils seront finalement convoqués à poursuivre le concours, et passer à la seconde étape mais pour cela devront monter à bord d’un bateau avec d’autres personnes venues pour la même chose. Un climat austère s’installera mais ce qui arrivera saura les unir, j’ai beaucoup aimé cette idée ! Certaines personnes me plairont de par leur caractère..mais d’autres beaucoup moins. Mon coup de cœur fut Ikta, j’espère qu’on en apprendra davantage à son sujet et sur son passé ! Je le trouve mystérieux.

Tout commencera à se corser, lorsque les personnes à bord du bateau feront naufrage à la frontière Est, aux portes de la ville ennemie du royaume de Katjvarna. Ils devront survivre et faire appel à leur sens de survie dans ce voyage inattendu. Qui plus est avec une personne d’exception sauvée in extremis. Je peux juste dire qu’elle sera très importante à l’histoire,en plus d’être adorable en dessin.

J’ai beaucoup aimé les esprits des éléments et il en existe trois sortes : ceux du feu, de l’eau et de la lumière. Chaque esprit est liée à une personne, et je les ai vraiment trouvées adorables pour le coup ! Ne sachant pas encore comment elles s’expriment j’ai hâte d’en savoir davantage sur elles.

Maintenant je trépigne d’impatience de lire la suite, et de connaître les obstacles que devront affronter notre bande d’amis.

La Paresse des étoiles de Catherine Choupin

Voici un roman doté d’un titre pour le moins intriguant et séduisant ! La thématique est tout aussi mystérieuse, puisque la narratrice découvre que sa vie, en se déroulant, semble répondre à une logique bien précise, du genre étrange ; peut-être même fantastique. J’ai eu l’opportunité de lire cette histoire en partenariat avec les éditions Librinova. Merci encore à eux ainsi qu’à l’auteur !

Une fois le livre refermé, je reste assez perplexe face à l’ensemble. L’idée de départ est originale. La plume est belle, l’écriture intelligente, avec de l’esprit et de l’humour.
Les premières anecdotes étaient distrayantes et amusantes, notamment le passage sur les études et les premières amours du personnage. Le parti pris par l’auteur a su susciter mon intérêt. Plus elle observe qu’un schéma semble se répéter dans sa vie, plus le lecteur désire en connaître les raisons. Mais les explications sont rares.

De plus, le récit souffre de certains défauts.
D’abord, la structure est répétitive, ce qui donne presque l’impression de lire un travail scolaire. A la fin de chaque chapitre ou presque, la conclusion est constamment la même, ce qui crée évidemment un effet lassant. Peut-être s’agit-il d’un procédé d’écriture destiné à faire ressentir au lecteur les mêmes émotions que le personnage principal, ce qui se comprend. Quoiqu’il en soit, cette stagnation de l’intrigue m’a surprise car je pensais que les évènements formeraient vraiment une cohérence d’ensemble, qu’il y aurait une progression dans la recherche de sens. Je suis restée sur ma faim.
Ensuite, le narrateur s’étonne de phénomènes tout à fait courants. Ces coïncidences qu’il décrit, ainsi que le décalage entre l’attente et la satisfaction d’un désir, n’est-ce pas à la fois l’illustration de la loi de l’attraction, ainsi que celle de la nécessité du lâcher-prise ? Le personnage prétend vivre des expériences exceptionnelles, mais il me semble qu’au contraire nous avons tous expérimenté de tels constats et de telles sensations.

Enfin, la narration devient sur la longueur assez plate. On ne comprend pas toujours où l’auteur veut en venir. Le récit de la relation avec Franck s’étire en longueur. On s’attendrait à une montée en intensité, à une avancée dans l’histoire ; pourtant, rien de tel. C’est à mes yeux une lecture plutôt frustrante. Les anecdotes qui se succèdent présentent aussi un effet assez déprimant dans le sens où pour la narratrice, elles se révèlent toujours insuffisantes, décevantes. Cela flatte son ego que les choses tournent à son avantage, mais elle n’en retire pas de grandes satisfactions. A quoi bon ?

En définitive, ce livre vaut la peine d’être lu pour la plume de l’auteur, qui est vraiment recherchée. Mais mieux vaut être prévenu et se rendre compte qu’étant donné le nombre de pages, assez réduit, l’immersion dans le récit sera de courte durée. De plus amples développements auraient été encore plus satisfaisants, j’aurais aimé en savoir plus sur les forces à l’œuvre dans cette histoire, le vécu du personnage principal, et le contexte des anecdotes. Dans l’ensemble, le roman reste une lecture agréable, constellée de multiples allusions à la mythologie ou à la littérature.

100 jours en enfer de Robert Muchamore

 

Bonjour à tous !

Pour ma première chronique sur LivrAddict, j’ai choisi de vous présenter le tome 1 de la série Cherub, intitulé  »100 jours en enfer », écrit par Robert Muchamore.

Pour bien comprendre de quoi ça parle, je vous propose de commencer tout de suite par le

RESUME :

James, placé dans un orphelinat sordide à la mort de sa mère, ne tarde pas à tomber dans la délinquance. Il est alors recruté par CHERUB et va suivre un éprouvant programme d’entraînement avant de se voir confier sa première mission d’agent secret. Sera t-il capable de résister 100 jours ? 100 jours en enfer…

MON AVIS :

Ce livre est rendu très réaliste par une excellente documentation de l’auteur sur le monde de l’espionnage et des services secrets.
Malgré un départ de mise en situation un peu long, j’ai tout de suite accroché à ce livre.
Pourquoi, me diriez-vous ?

Eh bien, parce que l’auteur utilise un vocabulaire adapté aux jeunes, et surtout, car le scénario est très bien écrit, avec du suspens et des rebondissements à chaque page.

Pour accéder à CHERUB – une branche des services secrets américains constituée uniquement d’adolescents de 10 à 17 ans – James, le héros du livre, va devoir passer une sorte d’examen de sélection durant 100 jours, en évitant les pièges tendus par les instructeurs…
L’occasion pour lui de se faire des amis… et des ennemis.

Le texte est très bien écrit, je l’ai lu en mois d’une heure, même si j’ai préféré les tomes suivants.

Je vous conseille absolument ce livre, ainsi que tous les autres tomes de la série.

A bientôt pour une autre chronique !

L’Apocalypse des travailleurs de Valter Hugo Mae

Il s’agit d’un roman très dur où il est constamment question de survie et d’utilisation des uns et des autres, les femmes étant plus particulièrement victimes du pouvoir des hommes. En effet, les deux protagonistes féminins, Maria da Graça et Quitéria sont sans cesse utilisées comme de simples objets sexuels par les hommes de leur entourage. On peut cependant dénoter une très grande différence entre ces deux femmes : la première se laisse complètement contrôlée par son patron, cédant à ses avances et se persuadant peu à peu qu’elle aime ce « vieux maudit » qui se plaît à l’humilier à cause de sa supposée ignorance ; alors que la seconde se satisfait entièrement des relations qu’elle entretient avec ses différents amants, se situant ainsi sur un même pied d’égalité qu’eux.

Pour échapper à la misère, elles vont toutes les deux faire de leur mieux, à leur manière. Maria da Graça nie la violence qu’elle subit sur son lieu de travail. Pour cela, elle se venge secrètement sur son mari, Augusto, en versant innocemment chaque soir quelques gouttes d’eau de Javel dans sa soupe, simplement par jeu, et n’attend que de le voir partir en mer afin de profiter d’une tranquillité toute relative avec « son » monsieur Ferreira. Toutes les nuits, elle est aussi hantée par la vision de saint Pierre, qui refuse de la laisser entrer au paradis. Quitéria, quant à elle, se jette dans les bras d’Andriy, jeune émigré ukrainien qui a été contraint d’abandonner sa famille. L’amour semble être la seule issue pour les deux femmes, peu importe qu’il soit réel ou fantasmé.

Ce qui frappe en premier lieu lorsque l’on ouvre ce livre, c’est la présentation typographique hors norme. Il n’y a absolument aucune majuscule, aucun point d’exclamation ou d’interrogation ; seulement des points simples, des virgules, ainsi que quelques rares emplois de l’italique (dont un en première page). Cette parfaite économie de la parole, qui s’en tient au strict minimum — c’est-à-dire le sens, le contenu — n’est pas sans résonner avec le texte lui-même. Dans le roman, personne ne parle : Andriy ne connaît pas bien le portugais, monsieur Ferreira parle mais uniquement pour lui, étalant sa science de manière pédante et égoïste, niant ainsi la fonction première de communication du langage, Quitéria préfère agir et Maria da Graça acquiesce tacitement.

Finalement, seules les deux femmes se parlent et rompent ainsi la pesanteur du non-dit, de la souffrance. Et c’est à ce moment-là qu’elles se permettent d’être libres, par le biais d’un langage cru, sans tabous et souvent drôle, alors qu’elles n’ont aucune raison de rire de leur malheur.
Cet ouvrage, bien qu’il ne soit pas facile à lire, est une lecture agréable. Il est malheureusement intemporel et universel dans sa dureté et c’est ce qui fait sa principale force, appelant naturellement la compassion du lecteur. La langue est tantôt très brute et percutante, tantôt plus poétique et plus raffinée, offrant par là même au lecteur de belles pages à la philosophie simple mais juste. le titre n’est cependant pas des plus parlants car il n’est quasiment jamais question d’hommes. Si les femmes de ce roman sont des laissées-pour-compte dans leur quotidien, elles occupent toute la place dans l’oeuvre, reléguant les hommes au plan de simple prétexte pour être réunies. Mais cette masculinisation du titre ne serait-elle pas après tout un moyen de leur accorder l’égalité qu’on leur refusait jusqu’alors ?