Le passage de la nuit d’Haruki Murakami

Le passage de la nuit Haruki Murakami

Roman résolument cinématographique, Le passage de la nuit joue la carte de l’hypotypose pour installer son lecteur dans le rôle du narrateur-spectateur, hétérodiégétique mais pourtant pas omniscient. Les chapitres s’enchaînent et sont des plateaux de tournage dans lesquels on place les caméras. Parfois il n’y a qu’un angle, qu’une seule prise de vue. Le tout s’accompagne d’une bande-son omniprésente.

C’est une expérience fascinante, en tant que lecteur, que de s’observer dans la découverte d’une œuvre qui ne propose que de l’immédiat et ne livre aucune interprétation, justification ou explication autre que celles fournies par les personnages. Il y a, dans cette œuvre, une invitation à la dégustation personnalisée. On peut, au choix, se contenter de contempler, ou chercher à comprendre ce qui anime les uns et les autres, et forcément mettre de soi.

La nuit, c’est avant tout une ambiance, une atmosphère particulière dans laquelle chacun apporte ce qu’il veut ou ce qu’il peut. C’est ce que m’évoque la lecture de ce drôle de livre, qui est aussi un roman hommage: hommage à la musique qui rythme nos vies, mais également au cinéma de Godard et à son film, Alphaville, qui donne ici son nom à un love hôtel. Dans le film de Godard, l’émotion est interdite, dans le livre de Murakami, c’est le vocabulaire de l’émotion qui est banni. Les sentiments éprouvés par les personnages ne nous parviennent que par le biais de leur discours, de leur posture, de leurs actions, de ce fait ils sont interprétables à volonté. On découvre alors que l’émotion brute peut autant sinon plus que l’émotion décodée. C’est dans cette perspective que je parle de dégustation personnalisée. Le spectateur privé de grille de lecture s’oriente dans l’obscurité grâce à ses propres repères.

Un roman lumineux.

Mauvaise étoile de R.J. Ellory

Mauvaise étoile de R.J. EllorySynopsis

Texas, 1964. Après l’assassinat de leur mère, Elliott et Clarence ont passé le plus clair de leur adolescence dans des maison de correction et autres établissements pénitentiaires pour mineurs. Le jour où Earl Sheridan, un psychopathe de la pire espèce, les prend en otage pour échapper à la prison et à la condamnation à mort, les deux adolescents se retrouvent embarqués dans un périple douloureux et meurtrier. Alors que Sheridan sème la terreur dans les petites villes américaines bien tranquilles qui jalonnent leur route, une sanglante et terrible partie se met en place entre les trois protagonistes. Loin de se douter de la complexité de celle-ci, les policiers, lancés à leurs trousses, et en particulier l’inspecteur Cassidy, ne sont pas au bout de leurs surprises.

Mon avis

Il y a des livres comme ça dont le titre est déjà un personnage à lui seul… Et quel personnage !
La nuit nous enveloppe très vite comme pour mieux accentuer cette impression de prédestinée accablante qui nous saisit dès le début.
Cette mauvaise étoile dirige et manipule les événements, selon son bon plaisir. Elle règne quasiment en maîtresse absolue, et reste omniprésente à l’esprit du lecteur tout du long,

Une enfance désastreuse, le hasard d’une terrible rencontre, et le road trip assassin dans une Amérique des années soixante commence !

Le destin peut réserver de sombres apparences et celui de ces deux demi-frères ressemble à une longue et inexorable descente aux enfers. Les événements s’emballent à une vitesse vertigineuse, comme une chevauchée meurtrière se déroulant sous nos yeux impuissants.
R.J. Ellory nous prend avec habileté à témoin et parvient à nous imposer ce sentiment de malaise inhérent à cette sensation de fatalité écrasante. Est-il possible de lutter contre ces hasards qui jalonnent notre existence pour les tourner à notre avantage ? D’en détourner les effets néfastes par des choix et des décisions ultimes ?

Ce roman est noir, très noir, puisqu’il raconte l’enfantement du mal, la naissance d’un tueur et d’une aliénation macabre.
Révélé par son modèle, on assiste effrayés, à ses premiers pas, à ses balbutiements, ses délires et ses leitmotivs, jusqu’à devenir complètement terrifiés par sa résolution de soif de sang, comme unique et seul mode de fonctionnement.
Le besoin d’exister et de prendre le pouvoir poussés à leurs paroxysmes !

Alors oui ! J’ai souffert plus d’une fois pour les victimes évidemment, mais le Challenge de Léa Touch Book aura été pour moi l’occasion de découvrir un auteur avec un grand A.

Mes seuls dieux d’Anjana Appachana

mes-seuls-dieuxQuatrième de couverture:

Merveilles d’inventions narratives, ces huit nouvelles entrelacent cruauté inconsciente et enchantement amoureux, songeries amères et tendres, conflits cocasses ou tragiques. De la fillette qui s’invente une vie sentimentale en lisant Jane Eyre quand sa soeur se marie, à celle qui porte une dévotion folle à sa mère, les situations se répondent ; si bien qu’on éprouve le sentiment d’être dans l’espace multiple et concerté du roman, au sein d’une famille de la bourgeoisie indienne.

Mon avis:

J’ai acheté ce livre pour le challenge sur l’Inde. Je dois avouer que j’ai d’abord été attirée par la couverture plutôt que par le résumé, n’y connaissant rien en littérature indienne. Et bien je dois dire que c’est une vraie découverte!

Ces huit nouvelles sont toutes différentes, de par les protagonistes bien sûr (une fillette, une mère, une étudiante, une jeune mariée…) mais aussi par les situations. Ce livre s’axe principalement sur les conditions de vie des femmes en Inde, leurs obligations, les rapports avec les hommes, la famille ou le travail. Les nouvelles sont pour la plupart rédigées à la première personne, ce qui rend les récits d’autant plus vivants. En plus du choc culturel, le contraste est saisissant entre ce que vivent ces femmes (principalement issues des castes aisées) et notre quotidien d’occidentales.

Les nouvelles ne sont pas toutes du même degré. Certaines sont assez « légères » (en comparaison avec les autres), notamment celle de Sharmaji: seul personnage masculin mis en avant dans ce recueil, on observe à travers lui le monde du travail en Inde, les problèmes de hiérarchie et d’ancienneté ainsi que la place des femmes dans ce monde d’hommes.

D’autres nouvelles sont plus tragiques. Avec Bahu, on suit la nouvelle vie d’une jeune mariée, ses espoirs et ses rêves détruits par les obligations envers sa belle-famille. En effet, lorsqu’une femme se marie en Inde, elle part vivre dans la famille de son mari, avec pour obligation de s’occuper de sa belle-famille, tout en laissant de côté la sienne. Une situation difficile à vivre pour cette jeune femme, avec un mari devant choisir entre elle et sa mère. Une autre nouvelle, Incantations, est encore plus dure: elle raconte, par les mots de la petite soeur, le viol de l’aînée la veille de son mariage par son futur beau-frère, ainsi que les mois de souffrance qui vont suivre. Cette question du viol est très importante en Inde, avec la victimisation, la honte et la mise à l’écart que cela engendre.

Un très bon recueil de nouvelles, qui nous font découvrir une Inde du point de vue des femmes, certes aisées, et cela ne peut que nous faire réfléchir sur nos propres situations en Occident. En un sens, cette différence de culture est tout simplement fascinante. En prime, un glossaire est présent à la fin du livre pour tous les mots spécifiques et les références sur la civilisation indienne.

Si l’Inde vous attire, surtout n’hésitez pas à lire ce livre!

Splitter de Sebastian Fitzek

Splitter de FitzekPrésentation de l’éditeur

Que se passerait-il si nous pouvions supprimer de notre mémoire les épreuves les plus difficiles de la vie? Et que se passerait-il s’il y avait alors un bug?
Marc Lucas a du mal à se remettre de l’accident de voiture qu’il a causé: sa femme n’y a pas survécu. Quand il entend alors parler d’une expérience psychiatrique, qui pourrait le libérer de ce terrible souvenir, Marc espère une vie meilleure. Cependant, l’angoisse le gagne peu après les premiers tests: la clé de son appartement ne rentre plus dans la serrure, un autre nom est inscrit sur la sonnette et lorsque la porte s’ouvre, Marc se retrouve face à son plus terrible cauchemar…

Mon avis

D’après mes recherches, ce roman n’est pas encore sorti en français. Les fans de Fitzek ne lisant pas l’allemand devront donc patienter encore un peu. Pour ma part, la VO me convient tout à fait, mais avant tout j’aimerais expliquer brièvement la signification du titre: "Splitter" – mis à part le fait qu’il s’agit d’un des substantifs les plus utilisés dans le roman – se réfère à un éclat de verre censé être planté dans la nuque du personnage principal suite à l’accident de voiture évoqué dans le résumé.

Passons maintenant au récit. La structure est relativement similaire à celle de "Thérapie", le premier roman de Sebastian Fitzek. Toutefois, le dénouement est ici plus crédible et le rythme beaucoup plus soutenu. Le lecteur a à peine le temps d’assimiler les évènements que les personnages tentent déjà de répondre à d’autres questions.

Au fil de l’histoire, Marc Lucas tente de différencier le vrai du faux, de mettre de l’ordre dans ses souvenirs. Fait-il partie du programme MME (Memory Experiment)? Sa mémoire a-t-elle été manipulée? A-t-il perdu la raison? Voici les questions qu’il se pose et qui incitent aussi le lecteur à remettre en cause le récit. Ce qui peut paraître confus pour l’un, est tout simplement génial pour l’autre. Fitzek aime faire réfléchir ses lecteurs et s’y prend à merveille.

En étant un tant soit peu attentif, le lecteur démasque très rapidement les "conspirateurs" et résout sans problème l’énigme du bandage et des médicaments qui font partie du quotidien de Marc depuis l’accident. Cependant, après avoir deviné le qui et le comment, le lecteur peine à découvrir le pourquoi de l’intrigue. Jusqu’à la fin, cette question reste ouverte, à moins d’avoir fait attention aux petits détails insignifiants dès le début… Comme souvent chez Fitzek, le lecteur remarque à la fin, que tous les détails ont finalement leur importance!

De plus, les amateurs de Fitzek seront ravis de trouver dans ce livre ce que j’appellerais des bonus. On a d’une part le droit à quelques références à deux autres romans de l’auteur:
– l’enquête relative au "Voleur de Regards" a lieu en parallèle (page 149 de l’édition Knaur)
– on retrouve le professeur Niclas Haberland, Caspar pour les intimes, personnage principal dans "le Briseur d’Âmes" (page 257)
D’autre part, les remerciements toujours plein d’humour ne peuvent que faire sourire le lecteur. À cette occasion, Fitzek invite le lecteur sceptique (et germanophone!) à se rendre sur la page mpu-berlin.org/anfrage pour savoir s’il a, oui ou non, participé à l’expérience MME…

Très bon thriller psychologique dans l’ensemble, j’aurais simplement souhaité un peu plus de nouveauté en ce qui concerne la construction du récit.

Découvrez les coulisses de Livraddict ! Chapitre 6

A l’occasion du cinquième anniversaire de Livraddict, nous vous avions proposé de poser toutes vos questions à l’équipe du site. Etant donné qu’elles furent nombreuses, nous y répondons dans une série d’articles sur ce blog. Vous allez tout savoir sur les coulisses de notre site !

 

images 4Question : Je me demandais , quand Jess et Baba ont crée le site, comment ont-ils lancé tout ça ? Comment ont-ils recrutés des admins et modo au tout début? et  Moi j’aimerais savoir comment a été continuée l’équipe actuelle de Livraddict et quels sont les critères qui conduisent aux postes que vous occupez…

Réponse de la Team Livraddict :

Quant le site a commencé, l’équipe s’est constituée assez naturellement : Jess a fait appel à des amis pour lancer son idée. Certains étaient blogueurs, d’autres amis « dans la vraie vie ». C’est ce qui a constitué la Team de départ, et elle s’agrandit soit par recrutement public, soit en contactant personnellement des personnes avec qui les membres de la Team ont un contact particulièrement bon. Quand Bibliomania a commencé, ses premiers correcteurs sont venus de l’autre site de Baba, Seriebox, où ils avaient déjà fait des merveilles pour maintenir la base de donnée de séries et de films en ordre. Depuis lors, l’équipe s’agrandit principalement de membres qui se sont fait remarquer positivement en signalant de nombreuses erreurs. Quant à l’équipe de modération, elle a été créée par quelques séances de recrutement ouvertes à tous les membres à partir du moment où la Team s’est rendue compte que le forum avait bien besoin d’être géré à temps plein par des spécialistes. C’est toujours comme ça qu’elle s’agrandit lorsque le besoin s’en fait sentir.

 

Question : Comment contactez vous les auteurs pour organiser des rencontres sur le forum ?

Réponse de la Team Livraddict :

Le plus souvent, ça se passe à la suite d’un partenariat : un éditeur ou un auteur dont le livre a été proposé à nos membres propose ou accepte une rencontre.

 

Question : Mais COMMENT gérez-vous les partenariats ?

Réponse de la Team Livraddict :

C’est un peu long et complexe (et ennuyeux !) à expliquer en détails, mais heureusement pour nous, Baba nous a créé un outil sur le site qui nous facilite grandement le travail. Nous pouvons y enregistrer les livres proposés et l’outil nous fait la liste des membres qui postulent pour chacun d’entre eux, avec les caractéristiques nécessaires. Nous faisons ensuite la sélection manuellement sur base de critères objectifs dont le but est d’une part de n’avoir que des candidats sérieux, et d’autre part que chacun ait sa chance d’obtenir un livre de temps en temps. Ensuite nous enregistrons les membres sélectionnés et nous envoyons les adresses aux éditeurs. Dans l’outil nous pouvons aussi enregistrer la date de réception du livre et à partir de là nous savons vérifier facilement que la chronique a été publiée dans un délai d’un mois.

D’un point de vue pratique, nous nous partageons le travail : certains membres de la Team sont responsables de certains éditeurs partenaires et c’est à eux de noter les livres proposés, d’envoyer les chroniques et de faire le suivi. Il y a un membre responsable pour enregistrer les dates de réception des livres, un autre pour vérifier que les chroniques sont rendues à temps et gérer les retards, un autre pour répondre aux questions. Et nous nous relayons pour gérer la préparation et le suivi des partenariats de chaque semaine. La sélection des participants parmi les demandes se fait collégialement. Nous communiquons aussi beaucoup, ce qui nous permet de savoir exactement ce qu’il s’est passé à tous les niveaux lorsqu’il y a un problème. Tout ça est assez complexe mais maintenant la machine est bien rodée !

 

Question : Je serais curieuse de connaitre les différents paliers, en fonction du nombre de messages : combien de rang, quel sont-ils, comment sont-ils dispatchés ?

Réponse de la Team Livraddict :

Ah mais il faut garder un peu de surprise, non ?  En réalité, la liste est trèèèès longue, mais si vous êtes vraiment curieux, vous pouvez la découvrir dans ce message. Elle a été créée en suivant les propositions des membres dans ce sujet. Pour ce qui est de l’évolution en fonction du nombre de messages, ça marche comme ça : de 0 à 1000 messages, ça change de rangs tous les 50 messages publiés, puis de 1000 à 5000 messages ça change tous les 100 messages, puis de 5000 à 15000 ça change tous les 500 messages, et au-delà, tous les 1000 messages.

 

Question : Je me suis déjà demandé s’ il existait des statistiques genre le record de connexions ? la proportion homme/femme parmi les inscrits ?

Réponse de notre webmaster, Baba :

Pour les statistiques, je vous renvois à ce topic « Livraddict en chiffres », ça m’évite de répéter dft009

La proportion homme/femmes, si on prend les statistiques facebook, il y a 83% de femmes ! La plupart entre 18 et 44 ans.

Sur le forum, je comptabilise 3360 hommes pour 13402 femmes. Ca donne aussi une proportion d’environ 80% de femmes.

 

Question : Moi, j’aurais voulu en savoir un peu plus sur le financement de Livraddict. Pas forcément le budget, je sais que les gens sont frileux quant à ce sujet, mais sur le mode. Par exemple, les ventes via le site suffisent-elles ? (sans que livraddict devienne un site marchand, je ne sais pas si les gens pensent tellement à passer par ici pour leurs achats en ligne)

Réponse de notre webmaster, Baba :

La boutique amazon de livraddict ne permets pas le financement seul du site. Ca rembourse peut-être 30% du total.
Actuellement, si on compte le serveur principal + le serveur de backup, j’en ai pour 50-60€/mois. Cela me permets d’héberger Livraddict mais aussi Seriebox, mon autre site séries/ciné/jeux qui a à peu près la même fréquentation. Je prends en charge tous les frais à titre privé.

 

Et voilà, nous avons répondu à toutes vos questions !  C’est donc le dernier billet de cette série sur les coulisses de Livraddict, en espérant que vous l’avez trouvée intéressante !